La pêche à l’anguille à l’aide de fascines était une activité économique importante jusqu’en 1970 à Petite-Rivière-Saint-François. La municipalité met en valeur cette pêche lors de festivités et de repas communautaires d’anguilles pochées et rôties.
La municipalité de Petite-Rivière-Saint-François détient un permis de pêche éducative pour montrer, notamment aux participants des Festivités de l'anguille, les rudiments de la pêche à fascines. Cette pêche fut d'abord une pratique d'acquisition, puis une activité économique d'importance pour la municipalité. Commémorer cette pêche devient ainsi un enjeu identitaire pour la communauté. La pêche traditionnelle à fascines consiste à ériger, à la manière d'un entonnoir, des « ailerons » sur le littoral du fleuve. Les « ailerons » sont maintenus par des « pattes d'ours ». À marée haute, les anguilles qui nagent avec le courant entrent dans l'enceinte des fascines. Or, lorsque la marée descend, elles restent emprisonnées dans cette enceinte et se dirigent dans la nasse, une sorte de "cage", à l'extrémité de la pêche. Les pêcheurs n'ont qu'à aller les recueillir dans la nasse avant le retour de la marée haute (sinon, elles ont la possibilité de partir). La meilleure pêche se fait entre le 15 septembre et le 15 octobre, principalement le soir, lorsque le fleuve est agité et qu'il y a un nordet. La lune influence également la pêche : la lune en croissant étant défavorable. Comme la municipalité n'a qu'un permis de pêche éducative, les prises sont rejetées à l'eau. Des animateurs sur les lieux expliquent aux gens le mode de fonctionnement de la pêche, donnent la description de ce qu'était "courir les pêches" et expliquent la préparation de l'anguille. Traditionnellement, les anguilles pêchées étaient consommées fraîches. Elles étaient parfois maintenues en vie dans des bassins ou des cages dans l'eau courante, ou encore on les congelait ou les salait à des fins de conservation. Pour quérir les anguilles, certains pêcheurs les prenaient à mains nues (un concours, durant les Festivités de l'anguille, permet aux participants de tester leur habileté) ou on les agrippait à l'aide de crampons pour les retirer de la nasse. Il y avait différentes techniques pour tuer et "plumer" l'anguille (ou la déshabiller, soit enlever sa peau). Par exemple, on pouvait les étêter, les mettre dans une poche en ajoutant du sel, leur planter un clou dans la tête et leur faire une incision autour du cou pour leur enlever la peau à froid, frotter avec son pied la queue de l'anguille pour que la peau cède et s'enlève d'un coup, etc. La peau de l'anguille servait à faire des lacets, pour le tressage de raquettes ou de sièges de chaises, etc. Elle a, entre autres, la particularité de prendre beaucoup d'expansion une fois mouillée. Une anguille pèse normalement entre 3 et 4 livres et peut nourrir entre 5 et 6 personnes. Sa viande est traditionnellement consommée pochée et rôtie et accompagnée d'une sauce à la mie de pain. La pêche à fascines, visible durant la saison traditionnelle de la pêche à l'anguille, est tendue au bord du fleuve Saint-Laurent, sur un terrain appartenant à la municipalité. Les installations (« ailerons », « racrocks » et nasses) se doivent d'être solidement maintenues (par des pattes d'ours et des haubans) pour éviter d'être emportées par les grandes marées.
On peut retracer ce type de pêche au début de la colonisation de Petite-Rivière-Saint-François. Les terres y étaient peu fertiles et les habitants vivaient des produits de la pêche et de la forêt. L'anguille fut tôt un mets local apprécié. Dans les années 1930, l'usine Maillard transformait l'anguille et une coopérative achetait les anguilles pour les exporter, notamment en Allemagne où l'anguille constitue un mets recherché. Dans les décennies 1940 et 1950, Petite-Rivière-Saint-François était, en quelque sorte, la capitale de l'anguille avec sa trentaine de pêches tendues. Les pêches furent abondantes jusque dans les années 1970 : les anguilles migrèrent, notamment sur la rive sud. La demande commença à diminuer : on parlait notamment de pollution dans le fleuve et de mercure dans les anguilles. Le gouvernement diminua le nombre de permis de pêche et plusieurs Riverains perdirent leur droit acquis de pêche commerciale. La dernière pêche commerciale à Petite-Rivière-Saint-François a cessé ses activités dans les années 1990. Aujourd'hui, les Festivités de l'anguille, créées dans les années 1970, tentent de conserver ce patrimoine. Aujourd'hui, rares sont les jeunes de Petite-Rivière-Saint-François qui savent monter une pêche à fascines. La municipalité possède un permis de pêche éducative afin de pouvoir mettre en valeur cette pratique. Même si peu de prises sont enregistrées dans la pêche, le public peut bien comprendre ce savoir-faire particulier.
La réalisation de l’Inventaire des ressources ethnologiques du patrimoine immatériel a été rendue possible grâce à l’appui de nos partenaires.