Fabrication de bardeaux de cèdre

Jean-Marcel Montreuil

Bûcheron retraité

Forme d'expression

Vidéo

Intérêt patrimonial

La fabrication de bardeaux de bois fut une activité très répandue à une certaine époque dans l'Outaouais, comme en témoigne la plupart des toits des maisons anciennes de la région. La profusion du cèdre, ainsi que la facilité d’obtention du produit fini, en faisait un matériau de choix. Aujourd’hui, d'autres matériaux ont surpassé le bardeau de cèdre et très peu de gens en connaissent encore les techniques de fabrication. Le témoignage de Jean-Marcel Montreuil est donc important et précieux puisqu’il est un des rares habitants de la région qui peut encore livrer des connaissances précises sur cette pratique. Sa pratique est reconnue par les membres de la communauté. Il a fabriqué, entre autres, les bardeaux du toit du Musée de la civilisation à Hull (maintenant Gatineau).

Description de la forme d'expression


Amincissement du bardeau,  IREPI

La fabrication de bardeaux exige des connaissances du bois et de sa taille. Les bardeaux sont de petites planchettes de bois minces que l’on utilise pour couvrir les toitures ou les murs extérieurs des maisons anciennes. L’essence de bois utilisée pour leur confection est le cèdre. Les plus beaux bardeaux sont faits de billots de cèdre d’environ 25 à 30 pouces de largeur. Un bardeau peut ainsi mesurer huit pouces de bordure et une dizaine de pouces de largeur. C'est la portion intérieure de l’arbre qui est choisie puisque le bois y est plus résistant, l’extérieur pouvant se désagréger plus rapidement. Fendre le bardeau est l’étape la plus importante. Plus il est épais, plus il sera résistant. Plus il est mince, plus le nombre de bardeaux réalisés avec un même bout de bois sera élevé. Le bardeau est taillé manuellement à l'aide d'un couteau en fer et d'un maillet de bois qui sert à frapper sur le couteau pour réaliser la coupe à l'épaisseur désirée (environ un demi pouce). Une fois coupé, il doit être taillé sur les cotés et aminci sur le plat vers le haut afin que les rangées de bardeaux puissent se chevaucher régulièrement et harmonieusment lors de la pose,  et rendre le toît étanche. On réalise entre 18 à 20 caisses de bardeaux par corde de bois. Une bûche peut donner lieu à une dizaine de bardeaux environ. La forme de l'arbre abattu est importante: il est préférable d'avoir un arbre au tronc droit, sans quoi les bardeaux peuvent être crochus. Le bardeau doit être fendu de manière à ce que les lignes d’années de l’arbre soient dans le sens de la longueur. S'ils sont coupés dans l’autre sens, les bardeaux seront moins résistants. Cela fait toute une différence lorsqu’on doit déneiger un toit. Avec du matériel de bonne qualité et une bonne pose, une couverture en bardeau peut durer environ 80 ans. Sa durabilité en fait donc un matériau de choix. 


Apprentissage et transmission


Confection d'un bardeau,  IREPI

Jean-Marcel Montreuil a appris les techniques de fabrication de bardeaux de cèdre d’un retraité de son village. Il n’a pas encore transmis sa technique, car il ne trouve pas de jeunes intéressés. Selon lui, les gens souhaitent avoir un toit en bardeaux, mais ne veulent pas en fabriquer eux-mêmes car il s’agit d’une tâche qui demande beaucoup d’effort physique et nécessite de bonnes aptitudes manuelles. De plus, les bons cèdres sont aujourd’hui difficiles à trouver. C'est pourquoi les bardeaux ne sont plus autant utilisés qu'autrefois. Généralement, les gens achètent du bardeau afin de rénover des maisons historiques ou pour décorer l’intérieur de leur maison. Tant qu’il n’y aura pas de véritable marché, il n’y aura pas de relève.

Historique général


Bardeaux de cèdre,  IREPI

Vers l’âge de 17 ans, au début des années 1970, Jean-Marcel Montreuil a appris les techniques de fabrication de bardeaux. Travaillant comme bucheron en forêt, il occupait la saison morte à faire des caisses de bardeaux. Très vite, il s’est forgé une réputation. Plusieurs particuliers achetaient alors ses bardeaux ou lui passaient des commandes spécifiques. Il a d’ailleurs fait le bardeau qui recouvre le Musée des Civilisations à Hull, alors nommé Musée de l’Homme. La confection des bardeaux était faite à la main et il n’était pas rare d’endommager certains d’entre eux. Cependant, les rebus toujours utilisables étaient conservés et parfois revendus, ils étaient appelés « les bardeaux à la mélasse ». De moins bonne qualité, on plaçait de beaux bardeaux sur le dessus de la caisse et des bardeaux à la mélasse en dessous afin d’attirer les acheteurs potentiels. Puisque les bardeaux étaient superposés les uns aux autres sur la couverture, les bardeaux endommagés pouvaient très bien servir pour la rangée du fond. Une caisse régulière se vendait 1,75$, une grosse caisse 2,25$.


Avant la période de la Révolution tranquille et l’exode rural, la plupart des gens fabriquaient eux-mêmes leurs bardeaux à partir du bois extrait de leur terre. On les réalisait durant la saison hivernale, les activités étant au ralenti, et les acheteurs visitaient les fabricants au printemps. Cela offrait un revenu supplémentaire. À cette époque, à moins de provenir d’un lot privé, les arbres utilisés pour les bardeaux devaient être des arbres morts. Les arbres vivants étaient réservés à la construction des chemins de fer. On prenait donc les rebus de grosses branches ou les restants pour le bardeau. Ayant perdu sa popularité auprès des Québécois, le bardeau de cèdre revint à la mode au tournant des années 1970. Mais cette fois-ci, non pas pour recouvrir l’extérieur de la maison, mais pour en tapisser les murs intérieurs des sous-sols, souvent équipés d’un minibar assorti.


Localisation complémentaire

  • Ville : Saint-André-Avellin

Sources

  • Nom du facilitateur ou des facilitateurs : Mathieu Allard et Jennifer Ayrault
  • Date d'entrevue : 2011-07-08
  • Nom de l'indexeur ou des indexeurs : Mathieu Allard

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Photos

  • Amincissement du bardeau,  IREPI
  • Confection d'un bardeau,  IREPI
  • Bardeaux de cèdre,  IREPI
  • Outils nécessaire à la transformation des bardeaux,  IREPI
  • Transformation du bois de cèdre,  IREPI

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