En Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine, la popularité des noms des familles souches crée des homonymes. Une tradition linguistique s’est développée pour distinguer les individus et est encore bien vivante notamment au sein des descendants acadiens, le surnom par filiation. La transmission s’effectue oralement depuis plusieurs générations et par écrit dans l’annuaire téléphonique.
Il existe une tradition linguistique encore bien vivante à Bonaventure qui consiste à identifier les gens en référence à leur parent, leur conjoint ou tout autre « surnom de famille ». Cette façon d'identifier les gens est de coutume surtout au sein des populations de descendance acadienne, où les noms de famille sont peu diversifiés. À Bonaventure par exemple, il existe trois grandes familles souches : Arseneault, Bourdage et Poirier. Compte tenu de la popularité de ces noms de famille, il est nécessaire d'employer des surnoms, surtout par filiation, pour reconnaître les homonymes et du coup éviter les confusions. Par exemple, pour reconnaître Serge Arseneault du Conseil de la culture de ses quatre homonymes, les gens le surnomment Serge à Raymond, en référence à son père. Il faut parfois remonter à plusieurs générations pour reconnaitre deux homonymes : François à Raoul à Jos à Ben et François à Raoul à Jos à Napoléon. Mais pour simplifier, les gens utiliseront plutôt les surnoms François à ti-Raoul et François à gros-Raoul. Notez que les surnoms par filiation ne renvoient pas exclusivement à la lignée paternelle, mais peuvent aussi bien faire référence à la mère, surtout lorsque le père est décédé jeune. D'autre part, le surnom par filiation peut également être un signe d'intégration pour les nouveaux arrivants. Cette pratique culturelle est très répandue à Bonaventure et s'actualise constamment, non seulement par l'oralité, mais également par écrit, notamment dans l'annuaire du téléphone (voir photographies).
La coutume d'utiliser des surnoms par filiation est surtout vivante dans les communautés de descendance acadienne. Cette pratique est répandue à Bonaventure, Maria et Carleton, ainsi que dans le secteur de Matapédia-les-Plateaux et celui des Îles-de-la-Madeleine. La transmission des surnoms par filiation s'effectue oralement au sein de la population de Bonaventure. Comme il n'existe pas d'autre moyen de reconnaître les homonymes, cette coutume se transmet depuis plusieurs générations. Or, comme les noms de familles sont plus diversifiés aujourd'hui et que les familles sont moins nombreuses qu'à l'époque, cette pratique culturelle est moins populaire auprès des jeunes, qui utilisent d'autres types de surnoms pour s'identifier.
L'utilisation des surnoms par filiation remonte à plusieurs générations. Aujourd'hui, cette pratique culturelle est encore bien vivante en Gaspésie acadienne, particulièrement à Bonaventure. Serge à Raymond (Arseneault), conseiller municipal à Bonaventure et employé du Conseil de la culture de la Gaspésie, souhaiterait systématiser, dans le cadre des festivités du 250e anniversaire de Bonaventure, l'utilisation des surnoms par filiation dans l'annuaire du téléphone, non seulement pour éviter les confusions entre les nombreux homonymes, mais aussi pour souligner l'originalité et l'importance de cette pratique linguistique traditionnelle au sein de la population.
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