Maurice Gauthier

Trappe au castor

Personne

Intérêt patrimonial

En Abitibi, la trappe a longtemps été pratiquée par les peuples amérindiens, les Eurocanadiens et les métis soit pour se nourrir, se vêtir ou le commerce de la fourrure. Maurice Gauthier trappe le castor depuis près de quarante ans. C’est au contact d’autres trappeurs de la région abitibienne qu’il a acquis les rudiments de ce métier. Un savoir-faire qu’il a transmis à sa femme et à sa fille.

Description de la pratique, du savoir ou du savoir-faire


Maurice Gauthier, passionné de la nature et de la faune, trappe le castor et d’autres espèces d'animaux à fourrure depuis près de 40 ans. Cette activité a pour objectif de prélever la fourrure des bêtes, qu'il peut ensuite revendre, et la viande pour la consommation alimentaire de sa famille et son réseau social. Il piège les bêtes en automne et en hiver. Il observe les activités des castors en été pour mieux connaître la population des huttes de castor sur ses territoires grâce aux prélèvements annuels. Si le permis de trappe ne contraint pas le piégeage par des quotas, Maurice procède en fonction de l'équilibre de la faune. Il prélève en moyenne une cinquantaine de bêtes annuellement. S'il piège de trop vieux ou de trop jeunes castors, cela signifie que la population adulte baisse et que ce sont les jeunes et les vieux qui doivent se déplacer pour aller chercher la nourriture. Maurice cessera alors de les chasser jusqu'à l'année suivante. Celui-ci tentera de conserver une population stable de cinq à six castors par hutte. Maurice connaît les circuits des castors qui se rendent en forêt pour aller chercher à manger ou pour vérifier les barrages. C'est à cet endroit qu'il pose chaque année deux types de piège : le premier, le piège en X, est posé dans la descente d'une digue à castor. Maurice ouvre le piège et le maintient dans cette position à l'aide d'une barre liée à une détente qui sera déclenchée au passage du castor dans son circuit habituel. Ce piège est simplement déposé au sol et est maintenu par des branches. Il est ensuite camouflé par différentes herbes et tiges prélevées à proximité. Pour sa part, le piège numéro 4, par noyade, est un piège à mâchoire qui est posé sous l'eau à quatre pouces de la surface, sur le haut du barrage vis-à-vis de la descente du castor. Il possède deux mâchoires qui se referment sur les pattes du castor et qui l'entraîne au fond de l'eau, à quelques mètres, puis le noie. Avec ces deux installations, Maurice peut trapper deux castors à la fois. Ces techniques sont principalement utilisées à l'automne. L'hiver, il piège ensuite au collet à l'aide d'un fil en métal activé par une détente qui se referme sur l'animal. Maurice Gauthier possède un terrain de trappe de 59 kilomètres carrés à une trentaine de kilomètres de sa résidence, près du Lac Turgeon. Celui-ci passe plusieurs jours à son camp pour y pratiquer la trappe. Sa femme pratique le piégeage dans les environs de la résidence, où l'on trouve différents sites de castor que Maurice entretient et observe depuis plus de 20 ans. Le travail de l'écharnage est effectué ensuite chez lui, au sous-sol, seul ou avec l'aide d'amis algonquins. Il partage alors la viande du castor en échange de leur aide. Les peaux sont ensuite vendues à la Compagnie de la Baie d'Hudson lors d’enchères. Adverstor, une compagnie concurrente, ou un particulier, Fourrure Claude Grenier, lui achètent aussi à l'occasion ses fourrures. Les prix sont assez bas : un castor valait en 2008 seulement 19 $ pour environ une heure à une heure et demie de travail. Maurice continue donc à piéger par passion. Il consomme toujours les castors piégés ou les offre à des Autochtones de la région avec qui il s'est lié d'amitié.


Apprentissage et transmission


Maurice Gauthier a acquis le savoir-faire de trappeur dès l'âge de sept ou huit ans, en accompagnant des gens possédant des terrains de piégeage. Il aidait à différentes tâches tout en apprenant le métier de trappeur. Il a commencé à trapper seul vers 12 ou 13 ans sur les terrains d'autres trappeurs. Maurice Gauthier offrait ensuite ses prises aux propriétaires des terrains de trappe qui n'avaient pas encore atteint leurs quotas de piégeage annuel. Maurice a initié sa femme Annette, puis sa fille de 20 ans au piégeage. Celles-ci pratiquent la trappe sur des terrains à proximité de la résidence familiale et l'accompagnent à l'occasion en forêt sur les terrains près du Lac Turgeon.

Historique général


Avant l'arrivée des Européens sur le continent américain, les activités de trappe étaient essentielles aux Autochtones, leur fournissant nourriture, vêtements et abris. L'industrie de la traite des fourrures à partir du 16e siècle bouleverse profondément l'économie autochtone et l'équilibre de la faune, si bien que plusieurs espèces sont menacées, dont le castor. L'industrie de la fourrure diminue au 19e siècle, mais la pratique se perpétue encore aujourd'hui. Au Canada, on estime le nombre de trappeurs à près de 80 000, et moins de la moitié seulement sont d'origine amérindienne. La région de l’Abitibi-Témiscamingue a été exploitée par la traite des fourrures dès 1670. Plusieurs postes de traite s'y sont développés, tels les forts Témiscamingue et du lac Abitibi. Ces forts ont constitué un lieu d'échanges important entre les populations amérindiennes et les descendants de colons anglophones et francophones. Né en 1948, Maurice Gauthier a grandi à Val-Paradis sur une ferme en bordure de la rivière Turgeon. Depuis son enfance, il a côtoyé les communautés algonquines de la région. En effet, plusieurs familles s'arrêtaient chez les Gauthier lors de leur passage pour se reposer quelques jours avant de poursuivre leur route vers le nord ou vers le sud. Aujourd'hui, Maurice entretient toujours des relations avec ces personnes. Lui-même a du sang autochtone et il s'identifie comme métis. Pour Maurice, la chasse et la trappe constituent des pratiques de gestion de l'équilibre naturel et un réel contact avec son environnement naturel. Il y a une cinquantaine d'années, le permis de piégeage n'était pas obligatoire. Par contre, il y avait des quotas de prises limités à une bête et demie par hutte de castor sur chacun des territoires de trappe. Aujourd'hui, il faut se procurer un permis auprès du gouvernement après avoir suivi une formation sur les techniques de piégeage et de sensibilisation aux animaux. S'il n'y a pas de quotas associés à la trappe au castor, plusieurs autres espèces sont limitées par un nombre maximal annuel de prises.


Documentation

Villerbu, Tangi, Trappeurs francophones des Plaines et des rocheuses étasuniennes, Encyclopédie de l'Amérique française, en ligne : www.ameriquefrancaise.org. Encyclopédie de l'agora, Abitibi-Témiscamingue : des premiers postes à la colonisation. En ligne : agora.qc.ca Foster, John E., Traite des fourrures, Encyclopédie canadienne, en ligne : www.thecanadianencyclopedia.com Cumming, Bruce Gordon, Trappage d'animaux à fourrure, Encyclopédie canadienne, en ligne : www.thecanadianencyclopedia.com

Sources

  • Nom du facilitateur ou des facilitateurs : Elise Bégin
  • Date d'entrevue : 2008-08-13
  • Nom de l'indexeur ou des indexeurs : Elise Bégin

Fiches associées

  • Gérald Bilodeau

    Gérald Bilodeau
    Gérald Bilodeau a appris auprès de son grand-père maternel métis et de ses oncles qui possédaient des terrains de trappe. Son père ne pratiquait pas la trappe. Gérald a commencé vers l'âge de six ans en observant ce que faisait son [...]

Sons

Photos

Facebook

Partenaires

La réalisation de l’Inventaire des ressources ethnologiques du patrimoine immatériel a été rendue possible grâce à l’appui de nos partenaires.

  • Logo - Conseil québécois du patrimoine vivant
  • Logo - Chaine de recherche du Canada en patrimoine ethnologique
  • Logo - Musée québécois de culture populaire
  • Logo - Société Québécoise Ethnologie

© 2024 Chaire de recherche du Canada en patrimoine ethnologique, Université Laval